La beauté d’une cascade isolée
La saison de glace arrive gentiment à son terme avec son lot de moments forts et d’émotions. Cette discipline a le mérite de réunir les plaisirs de l’alpinisme et l’escalade sportive avec un élément plus que refroidissant, simplement le froid. Ce dernier est le grand ennemi pour ceux qui préfèrent se dorer la pilule au soleil mais, en revanche, le grand ami des adeptes de la cryogénisation. Car il paraît que ça fait vivre plus longtemps mais certainement avec plus de rides vu les grimaces des pratiquants. Ce satané froid ne nous n’épargnent pas des célèbres débattues aux mains voir aux pieds pour certains. Les débattues, c’est comme quand tu prends un ovo, ça ne va pas mieux mais plus longtemps. Même Chioné, la déesse de l’hiver, ne se risquerait pas de nous contredire.
Malgré toute la beauté que peut amener la pratique de la cascade de glace, elle apporte tout de même quelques désagréments. Une tendance qui se démarque est que la glace, t’es tout fou quand la saison débute et heureux qu’elle soit finie. Selon les dires des grands-parents qui gardent leurs petits-enfants, c’est pareil. Chouette quand ils arrivent et ouf quand ils repartent (les “chic-ouf”). Dans les Alpes, nous avons de la chance que la saison dure 3 voir 4 mois. Pensez à nos amis canadiens où la saison peut durer jusqu’à 6 mois.
Vivement qu’ils partent
Cette discipline, c’est aussi beaucoup de clichés surtout les réseaux sociaux. Qui n’a jamais vu des phrases classiques telles que « Oh je prendrais bien un dessert.» «Aujourd’hui c’était glace vanille mais je préfère fraise.» Non!!! A quel moment de l’eau sous forme solide pouvait avoir un arôme ? Les sources de sirops ne sortent pas des montagnes à ce qu’on sache mais à Martigny (cf. Morand). Donc arrêtons de stigmatiser ces pauvres cascades, elles n’ont rien demandé.
Dans les sports les plus répétitifs, cette activité se place certainement dans le top 3 après l’aviron et le lancer de javelot.
En glace, c’est taper, ancrer, tirer, désancrer, taper, ancrer, tirer, désancrer, taper, ancrer, VISSER, tirer, désancrer…
Répétition sur répétition. Vidéo: C. Duchatelet
De plus, il est malheureusement nécessaire d’avoir une certaine force physique autant dans les bras que dans les mollets. Ce n’est pas indispensable mais ça aide quand-même. Vous l’aurez compris, cette discipline permet de sortir tous les vieux classiques sur les devises. Comme pas de bras, pas de choco… ou un mars et peut-être ça repart
Mais alors, qu’est-ce qui pousse les vagabonds de la vertical à en pratiquer et même des personnes à s’initier? Il faut quand-même admettre que cette complexité de forme naturelle émet toujours une beauté spectaculaire. Ces menhirs de lumière figés qui se laissent grimper nous laissent sans voix. Cette eau emprisonnée nous permet, avec de l’imagination, de voir les formes les plus exubérantes.
Exemple dans le voyage au royaume des nains de glace à Kandersteg. Photo: E. Chapalay
De surcroît, l’adrénaline que sécrète le corps nous métamorphose pour ne penser à rien d’autre que de taper, ancrer, tirer… Cette dernière est censée libérée une émotion comme la peur mais les sensations fortes prennent le dessus. Une fois que la journée est terminée, on se réjouit déjà de la prochaine tel un drogué en manque. On apprécie d’être dans l’ombre et le froid afin de mieux savourer la lumière et le chaud.
Tout cela pour dire, que la glace, c’est quand même une activité assez exceptionnelle. Durant mon deuxième hiver comme aspirant-guide, j’ai eu l’opportunité de pratiquer pas mal de journées cet hiver. Je tenais à remercier toutes les personnes pour leur motivation sans faille et les bonnes barres de rire. J’ai eu un énorme plaisir de partager cet univers avec vous! Pour la saison prochaine, les piolets seront affûtés comme jamais parés à mordre la glace! Soyez prêts.
Illustrations des journées de cascade de glace. Bonne humeur garantie!